ARCHIVE - Les Conseils d’architecture, d’urbanisme et d’environnement (CAUE) vus par Denis Berthelot
Cette fiche, rédigée en 2008, propose une analyse des CAUE qu’il peut être intéressant de consulter pour un regard sur les CAUE à cette époque.

Fiche rédigée par Denis Berthelot - Maître de conférences à l’Institut d’aménagement régional (IAR) d’Aix-en-Provence - Université Paul Cézanne - Aix-Marseille III - 2008.
ATTENTION : si cette fiche présente un intérêt rétrospectif, certains éléments évoqués ci-dessous ont potentiellement évolué depuis 2008.Cette fiche est donc proposée sur notre site uniquement pour l’intérêt qu’elle représente en tant que point de comparaison permettant d’entrevoir certaines évolutions législatives et réglementaires.POUR UNE APPROCHE PLUS RECENTE :Vous pouvez notamment consulter notre présentation des CAUE.
La fin des années 70 est marquée par une importante diffusion de l’urbanisation sous la forme de maisons individuelles. Ce mouvement a notamment été favorisé par les aides à l’accession à la propriété mises en place par l’Etat.
C’est dans ce contexte que la loi du 3 janvier 1977 sur l’architecture a été votée. Affirmant que l’architecture est une expression de la culture, elle pose le principe que la création architecturale, la qualité des constructions, leur insertion harmonieuse dans le milieu environnant, le respect des paysages naturels ou urbains ainsi que du patrimoine sont d’intérêt public. Pour aider au respect de cet intérêt, elle prévoit notamment dans son article 6la création d’un Conseil d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (CAUE) par département. Leur objet est la promotion de l’architecture, de l’urbanisme et de l’environnement. Ils assument à cet effet des missions de service public dans un cadre et un esprit associatif. Leur mode d’action principal est celui du conseil auprès des collectivités et des particuliers. Plus de 9000 communes font chaque année appel aux compétences des CAUE.
I - Modalités de création et de fonctionnement
Les CAUE sont des associations au titre de la loi de 1901. Leur création est laissée à l’initiative des Conseils généraux. Les CAUE sont présents dans 89 départements. Leurs statuts, déposés en préfecture, peuvent prévoir notamment les modalités de la collaboration du CAUE avec les collectivités, le milieu professionnel et les représentants de l’Etat.
L’association peut regrouper des représentants des collectivités locales, des professions concernées et de l’Etat ainsi que des personnes qualifiées. Elle est organisée en deux instances et une équipe technique : l’assemblée générale, le Conseil d’administration et l’équipe technique.
L’assemblée générale est composée de l’ensemble des adhérents. Elle vote le budget et approuve les objectifs et le programme d’actions. Elle élit une partie du Conseil d’administration.
Le Conseil d’administration définit les objectifs et le programme d’action dans le cadre de ses missions légales. Ce Conseil d’administration comprend 23 membres :
- 6 sont choisis par le Conseil général parmi les élus locaux ;
- 4 représentants de l’Etat sont membres de droit : le Directeur départemental de l’Equipement, le Directeur départemental de l’Agriculture et de la Forêt, l’Inspecteur d’Académie, l’Architecte des Bâtiments de France ;
- 6 personnes qualifiées ou compétentes représentant le milieu professionnel et le monde associatif sont nommés par le préfet ;
- 6 sont élus par l’Assemblée générale
- 1 représente le personnel.
Le Conseil d’administration est obligatoirement présidé par un élu local.
L’équipe technique est pluridisciplinaire et comprend des architectes, des paysagistes et des urbanistes. Son directeur est nommé par le président du Conseil d’administration avec l’accord du préfet.
II - Une charte, des missions
Les CAUE assument des missions de service public. Afin de coordonner leurs objectifs et leurs actions sur le plan national, ils se sont dotés, lors du Congrès de Béziers en juin 1990, d’une charte.
1. La Charte des CAUE
Cette Charte définit les CAUE comme :
- des associations ouvertes à l’ensemble des acteurs de l’aménagement du cadre de vie et le lieu du débat sur l’architecture, l’urbanisme et l’environnement ;
- des outils de la solidarité des collectivités territoriales ; Leur rôle est de faciliter, dans chaque département, les équilibres entre les territoires et l’exercice des compétences issues des lois de décentralisation.
Sur cette base, les CAUE s’engagent à fonder leur action sur quatre principes fondamentaux : - l’indépendance par rapport aux enjeux, notamment financiers ;
- la recherche d’innovation dans les méthodes et les démarches ;
- la pluridisciplinarité dans l’approche, l’analyse et le traitement des problèmes ;
- la volonté d’animer un partenariat entre tous les acteurs de l’aménagement des territoires.
Si cet engagement met en avant l’indépendance financière et politique des CAUE, l’innovation et le travail d’équipe pour l’ensemble de leurs missions, Christian Vigouroux dans son rapport de mission sur les CAUE souligne que leur unité d’action est menacée par les difficultés financières rencontrées par certains d’entre eux.
2. Les missions des CAUE
Elles sont au nombre de quatre : informer, sensibiliser, conseiller et former, ainsi que le développe la plaquette de présentation des CAUE publiée par leur fédération nationale.
La Fédération nationale des CAUE a souligné dans son Projet de modernisation (2002) que, depuis leur création en 1977 la nature de ces missions s’est étendue du fait « du changement d’image et de rôle des territoires dans l’aménagement avec :
- la décentralisation ;
- la loi paysage de 1993 et la loi aménagement de 1995 ;
- la prise de conscience de l’importance du patrimoine quotidien ;
- les lois sur l’intercommunalité, le renouvellement urbain et l’aménagement durable ;
- la quête d’une démocratie plus participative. »
Informer
Cette mission a pour objet de promouvoir une architecture moderne, un urbanisme à l’échelle de l’homme dans le respect du patrimoine. Elle porte aussi sur tous les aspects qui contribuent à la qualité de l’environnement, sur les démarches et les possibilités d’actions offertes par les différents services administratifs et les professionnels. Elle peut également amener les CAUE à informer sur des projets à la demande d’un conseil municipal, d’un groupement de communes ou d’une association.
Sensibiliser
Il s’agit de développer la culture et la pédagogie à la qualité de l’architecture, de l’urbanisme, de l’aménagement et à la préservation de l’environnement. Les CAUE développent ainsi l’esprit de participation des citoyens en créant des espaces de partages d’expériences.
Conseiller
Les CAUE ont vocation à conseiller les collectivités comme les particuliers. Cette mission est celle qui mobilise le plus les équipes des CAUE.
Les CAUE conseillent les collectivités dans leurs choix en matière d’urbanisme, d’aménagement et de développement. Ils conseillent aussi les particuliers dans leurs projets de construction, du choix du terrain à l’insertion du bâtiment.
Former
Les actions de formation des CAUE sont dirigées vers les élus, les enseignants ou les professionnels du cadre bâti.
III - Un réseau
Les CAUE ont créé le 9 mai 1980 une fédération nationale sous forme d’association loi de 1901.
Chaque CAUE y est représenté par son président. Ce réseau fédératif national permet aux CAUE d’échanger des informations, de s’enrichir de l’expérience des autres départements et de porter des débats nationaux sur l’architecture, l’urbanisme et l’environnement.
Ce réseau rassemble un millier de professionnels architectes, urbanistes, paysagistes, écologues, géographes, sociologues, juristes, économistes,… dans des équipes pluridisciplinaires de 5 à 20 personnes. Des Unions régionales se sont constituées. En outre une Conférence technique permanente a été misse en place, composée de directeurs élus par régions. Elle est une force de propositions et un outil de gestion des actions communes à l’ensemble des CAUE.
IV - Les modes de financement
L’argent nécessaire au fonctionnement des CAUE provient de quatre sources.
1. La taxe départementale pour le financement des CAUE
Pour contribuer au fonctionnement des CAUE, la loi de finances de 1978 a créé une taxe départementale optionnelle ayant la même assiette que la taxe locale d’équipement, la taxe départementale pour le fonctionnement des CAUE. Cette taxe, votée par le Conseil général, s’applique à la construction, la reconstruction ou l’agrandissement de bâtiments, à l’exception des bâtiments à usage de service public, ou d’utilité publique, et de la reconstruction à l’identique de bâtiments sinistrés. Le montant de cette taxe est fixé librement par le Conseil général, le taux de la taxe étant toutefois plafonné à 0.3% de la valeur du bien immobilier conformément aux dispositions de l’article 1585d du code général des impôts. Le constructeur doit s’acquitter du paiement de cette taxe dans un délai de 18 mois après la délivrance de l’autorisation.
L’assiette de cette taxe fait débat depuis plusieurs années. Elle est en effet jugée injuste, car elle repose sur une partie seulement des acteurs de l’aménagement, les constructeurs, alors que les réalisateurs d’infrastructures ou les carriers (par exemple) n’y sont pas astreints, et d’un montant insuffisant pour permettre aux CAUE de faire face à leurs obligations renforcées par la loi Solidarité et renouvellement urbains du 13 décembre 2000.
2. Les contributions liées à des conventions signées avec des partenaires
Les CAUE peuvent signer des conventions de partenariat avec les communes et d’autres partenaires publics ou privés, comme les chambres consulaires. Ces conventions déterminent les contributions versées par les partenaires. Celles-ci peuvent être fixées de manière forfaitaire en fonction d’un programme annuel d’interventions, ou encore pour chaque type d’opération. Les opérations portent sur des missions d’assistance à maîtrise d’ouvrage, des permanences d’architectes conseils, la mise en place d’actions d’intérêt général, ou encore des actions de formation dans des établissements scolaires ou de formation continue à destination des professionnels du bâtiment. Ces conventions sont établies par le Conseil d’administration.
3. Les cotisations
Des collectivités territoriales et d’autres institutions peuvent adhérer aux CAUE qui ont un caractère associatif. Elles s’acquittent alors d’une cotisation dont le montant est fixé librement par le Conseil d’administration. Cela peut être par exemple au pro rata du poids de la population de la commune ou du potentiel fiscal de celle-ci.
4. Les subventions
Des subventions peuvent être allouées par la Région, le Département, les communes et la Communauté européenne. Cette dernière peut contribuer notamment au titre du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA) pour des actions en faveur de l’intégration paysagère des bâtiments agricoles.
Textes de références :
- Loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l’architecture
- Loi 81-1153 du 29 décembre 1981, supprimant le caractère obligatoire la consultation du CAUE (modification de l’article 4, 5 et 6 de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977).
- Loi n° 95-101 du 2 février 1995, relative au renforcement de la protection de l’environnement.
- Loi n°2000-1208 du 13 décembre 2000, relative à la Solidarité et au Renouvellement Urbain.
- Décret n° 73-1023 du 8 novembre 1973, portant codification des textes réglementaires concernant l’urbanisme.
- Instruction du 9 février 1978, relative à la mise en place des CAUE.
- Décret n°78-172 du 9 février 1978, portant approbation des statuts types des CAUE.
- Code de l’urbanisme : Partie législative : L.121-7
- Code général des impôts : Article 1585 D et 1599 B.
Bibliographie :
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- CAUE du Vaucluse, Rapport d’activités 2005, Edition du CAUE du Vaucluse, 20 p. (2006)
- CHOAY Françoise, L’allégorie du Patrimoine, Seuil, 254 p. (1992).
- FEDERATION NATIONALE DES CAUE (1998) Le métier de conseil des CAUE - Enjeux culturels et pratiques professionnelles. Assemblée générale du 14 novembre 1998. 23p.
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